Lors du déroulement de la phase de passation d’un marché public, les textes font obligation à l’acheteur public, lorsqu’il entend éliminer une offre qu’il juge anormalement basse, de demander des…
Lors du déroulement de la phase de passation d’un marché public, les textes font obligation à l’acheteur public, lorsqu’il entend éliminer une offre qu’il juge anormalement basse, de demander des explications au candidat concerné.
I – La détection d’une offre anormalement basse
L’article L. 2152-6 du code de la commande publique (CCP) dispose que « l’acheteur met en œuvre tous moyens lui permettant de détecter les offres anormalement basses.
Lorsqu’une offre semble anormalement basse, l’acheteur exige que l’opérateur économique fournisse des précisions et justifications sur le montant de son offre ». Quelle que soit la procédure de passation mise en œuvre, dans une telle situation, l’acheteur doit solliciter auprès du candidat toutes précisions et justifications de nature à expliquer le prix proposé (1). Le pouvoir adjudicateur pourra à partir de différents référentiels, analyser et comparer la dimension économique des offres reçues.
L’existence d’un prix faible par nature et en valeur absolue constitue bien souvent le premier indice, mais il doit s’apprécier globalement et non pas seulement au titre d’une seule prestation particulière du marché. Mais bien souvent, le pouvoir adjudicateur, afin de mieux appuyer sa décision, sera invité à corréler cela avec d’autres éléments. Il peut s’agir par exemple d’une comparaison avec l’estimation à laquelle il a lui-même procédé, mais aussi avec les autres offres reçues, ou encore de l’application d’une formule mathématique, étant entendu que tout ou partie de ces méthodes peuvent être utilement combinées, et cela est même très conseillé. Ainsi, la seule application d’un critère de type mathématique peut parfois être faussée par la nature du marché ou bien par un trop faible nombre d’offres.
II – Apporter les explications demandées
L’article R. 2152-3 du CCP apporte un éclairage en listant les considérations que le candidat peut le cas échéant mettre en avant. Citons pour illustration le mode de fabrication des produits ou le procédé de construction, les solutions techniques adoptées, la réglementation environnementale ou bien encore l’obtention d’une aide d’Etat par le soumissionnaire. Mais cette énumération réglementaire n’est en aucun cas exhaustive, et le candidat peut éventuellement se défendre en se référant à d’autres éléments d’appréciation.
Il peut s’agir par exemple d’invoquer des coûts de transports moins élevés que tout ou partie des concurrents, le recours à l’intelligence artificielle dans certains process, le choix de l’économie circulaire pour la fourniture de certains produits, …
Aucune information de cette nature n’est exclue par principe, de sorte que le soumissionnaire est libre d’invoquer les aspects qu’il souhaite, dont il estime qu’ils auront concouru à la détermination de l’offre de prix. C’est ainsi par exemple que le juge administratif a considéré fondé en droit le fait que l’acheteur a reconnu qu’une entreprise de collecte et de recyclage de déchets justifiait de façon suffisante l’absence de frais de collecte et de transport dans son offre par des économies d’échelle en raison de son activité avec de nombreux centres de tri, ce qui lui avait permis de minorer ses frais de déplacement (2).
L’acheteur rejette l’offre comme anormalement basse dans les cas suivants :
1° Lorsque les éléments fournis par le soumissionnaire ne justifient pas de manière satisfaisante le bas niveau du prix ou des coûts proposés ;
2° Lorsqu’il établit que celle-ci est anormalement basse parce qu’elle contrevient en matière de droit de l’environnement, de droit social et de droit du travail aux obligations imposées par le droit français.
Du point de vue contentieux, les principes de droit commun s’appliquent en cas de rejet de l’offre pour un tel motif. Le candidat dispose de trois voies de recours contentieux. Il peut introduire un recours sur le fond dans le but de contester la validité du marché après sa signature. En outre, le référé pré-contractuel avant la signature du marché et le référé contractuel après la signature du marché lui sont ouverts, et peuvent être engagés sans ministère d’avocat.
Références juridiques :
- (1) CAA Versailles, 17 décembre 2024, n°22VE01920 ;
- (2) CAA Toulouse 10 mai 2022, n° 20TL22631